Des pompes en plastique durables et désirables
publié le dimanche 12 janvier 2025
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De la recherche de designs différenciants à la mise au point de solutions durables, les fabricants de pompes s’efforcent d’innover pour répondre aux exigences des marques, des consommateurs et des réglementations. Sur un produit aussi complexe que la pompe, cela passe par un mouvement vers le tout plastique.
La durabilité – couplée à la performance – est depuis plusieurs années le moteur principal des innovations dans le domaine des pompes à destination des produits cosmétiques et d’hygiène. En parallèle de cet impératif, les clients attendent des fabricants des pompes bien adaptées au commerce en ligne, confortables à l’usage et avec une esthétique soignée. «On peut avoir l’impression que les pompes se ressemblent mais en réalité les variations sont nombreuses. Nos gammes standards allient esthétique et ergonomie et nous faisons évoluer nos références en fonction des tendances. Nous dépendons évidemment beaucoup de la forme des flacons. On voit d’ailleurs sur le marché de nouveaux produits aux formes organiques, sensorielles – ce qui nous interroge sur la façon d’apporter plus de sensorialité aux pompes», remarque Sabine Bouillet, directrice de la catégorie Soin et Maquillage d’Aptar Beauty. Chez Quadpack, «ajouter de la valeur et de la différenciation au design des pompes est un axe de développement important. Un produit peut paraître attrayant avec un capot, mais beaucoup moins une fois celui-ci perdu ou retiré. Par ailleurs, de nombreuses pompes se ressemblent, manquant d’identité de marque. Notre défi en tant que concepteurs d’emballages est d’aider à cette différenciation, transformant une simple pompe en un élément attrayant du produit», renchérit Karen Merchán, responsable de la catégorie Soin de Quadpack – qui vient d’être rachetée par le groupe PSB Industries.
Un besoin en sprayage ultrafin
Les pompes suivent la tendance du marché, avec une segmentation des produits plus importante et une montée en gamme. «Nos clients veulent se différencier dans les rayons avec par exemple une chape en métal sur la bague à vis, même sur des shampoings ou des après-shampoings. Cette tendance est un peu moins visible en Europe. Nous réalisons également des habillages de pompes classiques avec du marquage à chaud ou de la métallisation sur la bague à vis», détaille Hervé Bichon, vice-président des ventes de la division Beauté et Systèmes de distribution de Trimas Packaging – un groupe américain formé de différentes sociétés (Rieke, Taplast, Rapak, Aarts packaging…). En ligne avec une notion de premiumisation, le plastique mat est devenu tendance. «En proposant une finition mate sur deux de nos pompes pour brume fine, nous constatons que cela contribue à positionner les brumes corporelles du marché de masse dans un environnement plus luxueux», note Etienne Brière, directeur marketing pour la catégorie Hygiène de Silgan Dispensing. Le groupe dispose dans ses gammes des pompes Romantica et Sinfonia®, alliant esthétique et sprayage fin – à destination de produits comme des fixateurs ou des brumes corporelles. La demande du marché évolue aussi vers des sprays toujours plus fins. Romantica, lancée en 2024 sur le marché nord-américain, est un spray «micro-gouttelettes», pouvant par exemple convenir aux fixateurs de maquillage. En 2022, Silgan avait également lancé le spray Blossom, longue durée et sans gaz propulseur, offrant ainsi une alternative aux emballages aérosols pour les applications de déodorants.
Pompe plastique : le ressort, pièce maitresse
La réduction ou la suppression de certains éléments et la transition vers des pompes 100% plastique (monomatière ou mono-famille) constituent des priorités pour l’industrie. Sur un produit aussi sophistiqué qu’une pompe, il reste difficile de vraiment réduire le nombre de composants – mais chez Quadpack «nous observons une hausse de la demande pour des pompes sans capot», indique Karen Merchán. Autre focus : la suppression du POM, matière technique, utilisée pour différents types de composants ayant chacun leur spécificité. Dans de nombreuses gammes de pompes, il est désormais le plus souvent remplacé par du polyoléfine afin que le pack soit recyclable. «La recyclabilité des pompes est une tendance mondiale – et certains distributeurs majeurs l’imposent même. Cela signifie aussi éliminer le ressort en métal, la bille en métal ou en verre pour tout remplacer par du plastique. Nous avons récemment lancé la gamme de pompes Singolo en doses 2ccet bientôt 4cc, fabriquée en PP à 95% avec un ressort en plastique mélangeant PP et élastomère. Nous développons également une pompe mini-dose en 100% PE pour des produits de type contour des yeux, sérum, ou fond de teint liquide. Le plus gros challenge avec les pompes en tout plastique, c’est leur performance avec une formule visqueuse. Il est essentiel de trouver le bon design pour assurer un confort d’usage aux consommateurs. En effet, un ressort en métal a une meilleure «mémoire» qu’un ressort en plastique – qui nécessitera une force d’usage un peu plus importante pour l’activer. Il faut trouver le bon équilibre», souligne Hervé Bichon, qui constate – au niveau mondial – une tendance au développement des pompes délivrant de grandes doses (2cc, 4cc), en ligne avec la croissance des flacons de 1L ou plus (notamment aux Etats-Unis).
Des pompes en polyoléfine
« Nous restons dépendants du flacon : son matériau va guider le recyclage de la pompe. La pompe est compatible avec la filière verre par exemple, et ses composants métalliques sont recyclés. Dans la filière verre comme dans la filière plastique, la pompe reste solidaire du flacon. Nous proposons donc des solutions en 100% plastique ayant les mêmes performances que des pompes classiques en termes de sensorialité, de précision. On remarque aujourd’hui une bascule vers le 100% polyoléfine, avec des pompes en PE et PP afin de préparer la recyclabilité des produits vis-à-vis de futures règlementations. Les composants métalliques dans la filière plastique sont en effet considérés comme perturbateurs du recyclage. Cela a nécessité d’inventer d’autres systèmes en plastique pour compenser le retrait du ressort métallique. «Nous avons capitalisé sur notre expérience dans la technologie airless, avec laquelle nous proposions déjà des packs en 100% polyoléfine», explique Sabine Bouillet chez Aptar. Par exemple, la pompe mono-matière Future, fabriquée entièrement en PE, permet de créer un ensemble complètement recyclable lorsqu’elle est associée à un flacon en PE ou en PET. Elle peut, en outre, désormais intégrer un témoin d’inviolabilité (facile à ouvrir et non détachable) à ses deux modèles de boutons poussoir, Fenix et Pegaso. De son côté, le groupe Silgan lance de nouvelles doses pour sa gamme ReVive™ (100% polyoléfine), se diversifiant en doses de 4cc et 1,4cc afin de correspondre à différentes applications. Le fournisseur Quadpack a lui amélioré son flacon Skin Up doté d’une pompe (pour les fonds de teint et les crèmes) en retirant le métal de la pompe, dont le mécanisme est en PP.
La pompe tout plastique demandée pour une large catégorie de produits
Pour le rayon des pompes mousse, Quadpack a conçu Pure Foam, sa première pompe moussante sans métal, adaptée aux nettoyants, shampoings ou crèmes coiffantes. Disponible en capacités de 150 et 200 ml, Pure Foam est accompagnée d’un flacon en PET avec des options PCR pour le flacon et la pompe. Trimas vient également de lancer «Singolo foamer», une pompe mousse en 100% plastique (PP et PE), dotée d’un «ressort en plastique qui permet de constituer une mousse qualitative. Il doit être assez fort pour compresser le liquide et l’air. Pour ces pompes mousse, le marché est surtout américain et chinois », constate Hervé Bichon. Trimas travaille par ailleurs sur des pompes spray tout plastique pour les secteurs du capillaire, du solaire, et les sprays pour le corps. «Nous avons de nombreuses demandes. C’est un challenge car il faut beaucoup de pré-compression pour obtenir un beau spray et des particules fines. Le ressort doit être suffisamment résistant : cela passe par les matériaux, la conception. Nous devrions être prêts pour 2026», ajoute-t-il.
Relever le challenge de la compatibilité formule – matériaux
La compatibilité avec les formules reste un sujet essentiel, et un vrai challenge en lien avec les matériaux sur l‘ensemble des pièces composant la pompe. «Les formules sont de plus en plus difficiles à distribuer. Par exemple, les formules de fond de teint peuvent contenir des isododécanes et des alcanes à chaine courte, qui apportent une sensorialité supérieure à la formule. Mais ils constituent un vrai challenge technique car ils n’offrent pas une bonne compatibilité avec le plastique. Cela peut nuire aux performances de la pompe. La recherche matériaux est essentielle», souligne Sabine Bouillet. «Nous utilisons surtout des polyoléfines, des matériaux recyclables. Pour les composants en contact avec la formule, il s’agit de résines de grade alimentaire, ou – si le choix s’est porté sur du PCR, du PCR chimique. Mais, bien que l’objectif des clients soit d’intégrer un maximum de matières recyclées, le marché ne demande pas actuellement de pompes 100% PCR. Nous avons toutefois mis en place la démarche PCR Plus, afin de rassurer nos clients sur la possibilité de les utiliser sur des packs destinés au marché de la beauté, grâce aux niveaux de décontamination obtenus sur ces PCR mécaniques. Comme il s’agit d’un grade de matière différent avec des caractéristiques nouvelles (résistance, étanchéité, etc…), il est nécessaire de requalifier notre packaging pour les conversions de gamme existantes. Pour les développements de nouveaux produits, nous pouvons aussi travailler la conception de la pièce en PCR», détaille Bénédicte Luisi, directrice du Développement Durable «Produits» d’Aptar Beauty. La pompe Future Tamper-Evident peut, par exemple, intégrer du PCR certifié ISCC (FDA) ainsi que des bio-résines.
Explorer d’autres sources de matériaux
Les biorésines peuvent constituer une alternative. Il s’agit de matières biosourcées (bioPE, bioPP) ou issues de matières renouvelables (à base d’huile dérivée de déchets de l’industrie agroalimentaire ou de l’agriculture). «Les premières, utilisées dans nos packs, nécessitent la requalification de nos produits. Les deuxièmes, en revanche, sont intégrées sur un principe de mass balance et permettent d’obtenir une résine ayant les mêmes performances qu’un plastique classique. Nous avons développé des pompes en bioPE et bioPP surtout pour le marché de l’Amérique latine, où nous avons un fournisseur. En Europe, nous avons de plus en plus de demandes sur des matières biosourcées – bien que les clients soient plus orientés sur le PCR. Il n’y a pour le moment pas d’obligation règlementaire à basculer sur des biorésines, mais cela permet de sortir des matières fossiles. Il n’existe pas une solution unique et universelle : il est préférable de pouvoir mixer les différentes solutions de matières durables», conclut Bénédicte Luisi.