
Des emballages issus de plantes destourbières
publié le mardi 25 février 2025
Dans le cadre du projet Paludi, des chercheurs de l’Institut Fraunhofer IVV de Freising et Dresde viennent de démontrer, lors d’essais de faisabilité, que les plantes des tourbières (tourbe, roseau, alpiste roseau, etc.) ont un grand potentiel pour la fabrication de boîtes pliantes, de plateaux et autres emballages similaires. Le projet s’inscrit dans le cadre de l’initiative Fraunhofer Biogenic Value Creation and Smart Farming, soutenue par le ministère fédéral allemand de l’Éducation et de la Recherche (BMBF), le ministère bavarois de l’Économie, du Développement régional et de l’Énergie et le ministère des Sciences, de la Culture, des Affaires fédérales et européennes du Mecklembourg-Poméranie-Occidentale.
Les plantes étudiées dans le cadre du projet sont cultivées dans des tourbières et des marais réhumidifiés. À l’avenir, elles pourront croitre plus aisément puisqu’au moins 30% des surfaces des forêts, des prairies et des zones humides doivent être réhumidifiées et renaturées conformément à la loi européenne sur la restauration de la nature de février 2024. Cette initiative est nommée paludiculture. «Il s’agit de cultiver des espèces végétales adaptées aux conditions locales dans des tourbières humides. Les paludicultures contribuent à l’entretien des tourbières et à la protection du climat car elles minimisent les émissions de carbone – une raison de plus pour les étudier davantage», explique Fabian Kayatz, responsable du projet à l’Institut Fraunhofer IVV.
Par rapport au bois, les roseaux et les plantes similaires se caractérisent par une faible teneur en lignine, ce qui permet d’utiliser moins de produits chimiques lors de la réduction en pâte des fibres végétales pour obtenir une fibre de qualité suffisamment élevée nécessaire aux applications d’emballage. C’est le résultat de la caractérisation chimique des paludicultures de la région des marais de Freisinger Moos. Selon la plante, les chercheurs ont obtenu une teneur en lignine comprise entre 20 et 23%, soit un niveau de 15 à 25% inférieur à ceui du bois tendre et du bois dur. De plus, la pulpe de ces fibres végétales a de meilleures propriétés mécaniques que celle issue de la paille, du maïs ou du bambou.
En outre, la lignine des plantes non ligneuses peut être libérée ou séparée plus facilement des fibres, ce qui permet de mettre en place un mode de fabrication moins énergivore que les procédés conventionnels à base de fibres de bois. Ici, les chercheurs ont pu travailler à des températures inférieures à 100°C, soit jusqu’à 45% inférieures aux procédés classiques. Les résultats ont montré que, selon les paramètres, jusqu’à 83% de la lignine pouvait être libérée avec la méthode Fraunhofer IVV. «Après la récolte des plantes des tourbières, la biomasse obtenue peut être transformée à l’échelle industrielle dans l’usine de pâte à papier. La production de pâte à papier se ferait ensuite en réduisant en pâte les fibres végétales», explique Kayatz, qui précise que ces étapes sont menées encore à l’échelle du laboratoire. Le rendement en pâte à papier a atteint 53%, en fonction des paramètres combinés, ce qui se situe dans la fourchette attendue pour les procédés chimiques conventionnels.
D’autres essais ont démontré que les papiers plats et moulés en fibres produits présentaient une bonne aptitude à la transformation. La résistance à la traction de ces premiers échantillons était nettement supérieure aux valeurs de l’échantillon de référence (dans ce cas, une boîte à œufs). En ajoutant des additifs tels que l’amidon et l’agent de collage, il a été possible d’augmenter la résistance à la traction et l’élasticité ainsi que les propriétés hydrofuges des papiers. De plus, les papiers produits à partir de paludiculture se sont avérés adaptés aux méthodes de transformation telles que le pliage, le collage et l’impression.
Grâce aux procédés de moulage par fibres et d’emboutissage profond, les chercheurs ont pu produire des pots et des barquettes en papier solides à partir de fibres de roseau sans utiliser d’additifs. A cette occasion, une installation de laboratoire a été spécialement conçue pour la production de ces prototypes. Des ajustements seront cependant encore nécessaires pour passer à l’échelle industrielle, les premiers emballages devant être optimisés, en ce qui concerne par exemple leur perception sensorielle ou le choix du revêtement. Dans un premier temps, ces solutions sont destinées à un usage non alimentaire, comme les cosmétiques, la logistique et les fournitures de bureau.