Carbios pose la première pierre de son usine à Longlaville
publié le mardi 30 avril 2024
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Le 15 avril dernier, Carbios lançait la construction de sa première usine de recyclage enzymatique des plastiques et textiles. Plus de 200 invités étaient présents pour l’occasion : représentants des institutions, marques partenaires et partenaires industriels. Le site qui verra le jour à Longlaville en Meurthe-et-Moselle aura une capacité de traitement de 50 000 tonnes de déchets par an, une fois opérationnel.
L’événement est une première mondiale pour le secteur de l’emballage et du recyclage. La pose de la première usine de biorecyclage de Carbiosse voulait donc symbolique et a, d’ailleurs, valu la veille de la cérémonie un post Linkedin du président de la république, Emmanuel Macron : «une révolution tecnologique se concrétise demain avec la pose de la première pierre de l‘usine Carbios à Longlaville : première filière de biorecyclage au monde. Fierté française ! Transition écologique et croissance, fabriqué en France et innovation vont de pair». Un message complété par celui de Christophe Béchu, Ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires avant la pose de la première pierre : «elle illustre la force de l’engagement de la France en faveur de la transition écologique et témoigne de la capacité à transformer les défis en opportunités pour un avenir plus durable. Cette usine, une première mondiale, incarne l’innovation française à répondre aux défis environnementaux complexes, offrant ainsi une solution durable pour un avenir où les déchets plastiques et textiles seront transformés en ressources précieuses d’une économie véritablement circulaire».
Recycler les déchets plastiques non traités
En France, seuls 25% des plastiques ménagers – soit 3 MT générés par an – sont recyclés. Des chiffres qui laissent une grande marge de manœuvre aux acteurs du recyclage pour faire progresser ce taux. Et l’occasion pour Carbios de déployer sa technologie de biorecyclage enzymatique, une aventure née au cœur d’un laboratoire en 2011. «Nous sommes partis d’une simple intuition mais entourée des bonnes équipes académiques et industrielles, et avec de la patience et des investisseurs qui ont cru en nous, nous avons transformé la science en une réalité industrielle. Je suis fier du chemin parcouru en plus de 12 ans. Cette première pierre de l’usine de Longlaville marque le début de notre déploiement industriel et commercial pour faire de Carbios ces prochaines années un leader mondial du recyclage des plastiques», a déclaré Philippe Pouletty, fondateur et président du Conseil d’Administration de Carbios. Cette avancée technologique ouvre en effet de nouvelles voies de recyclage pour des produits jusqu’ici peu ou pas recyclés, leur conférant ainsi une valeur économique. «La force de Carbios est de valoriser des déchets non recyclés d’un point de vue mécanique pour en faire un plastique de haute qualité. Nous pouvons ainsi travailler sur des lots en mélange, souillés voire non lavés donc de qualité médiocre, nos enzymes resteront tout aussi performantes. Le coût principal de notre technologie reste principalement lié à celui du déchet. Raison pour laquelle nous souhaitons nous ouvrir à un autre flux que celui des bouteilles PET, dont les prix fluctuent énormément et qui bénéficient déjà d’un circuit bottle to bottle bien rodé. L’idée est de recycler d’autres déchets comme les barquettes multicouches colorées, mais aussi les emballages cosmétiques ou encore les tshirts en polyester», détaille Emmanuel Ladent, directeur général de Carbios.
Un investissement de taille
La future usine aura une capacité de traitement de 50 000 tonnes de déchets PET préparés par an (soit l’équivalent de 2 milliards de bouteilles colorées, 2,5 milliards de barquettes alimentaires ou 300 millions de tshirts) et représente un investissement de 230 M€ selon le dernier chiffrage 2023. Elle se déploiera sur un terrain de 13 hectares officiellement acquis auprès d’Indorama Ventures le 14 février 2024. «100 M€ ont déjà été investis par Carbios en Capex en 2024 sur ce site. Nous bénéficions, par ailleurs, d’un financement de 54 millions d’euros dans le cadre de France 2030 opéré par l’Ademe et
la Région Grand Est», précise Emmanuel Ladent. Le projet de construction mené en partenariat avec la société De Smet Engineers & Contractors permettra la création de 150 emplois directs et indirects dans la région.
Plusieurs accords d’approvisionnement, notamment avec Citeo et Landbell Group, sécurisent une grande majorité des matières premières nécessaires. Proche des frontières avec la Belgique, l’Allemagne et le Luxembourg, l’emplacement de l’usine est stratégique pour trouver des déchets à proximité. «L’idée est de créer des circuits courts afin de réduire notre empreinte carbone en sélectionnant des sourcings de déchets entre 300 et 500 km autour de Longlaville. Notre procédé est déjà peu énergivore : les futures cuves de 300 000 litres d’enzymes ne sont chauffées qu’entre 65 et 70°C. Au final, notre plastique affiche une empreinte carbone réduite de 57% par rapport à un plastique vierge », indique le directeur général de Carbios. Prochaine étape pour la société : améliorer le taux de transformation de son procédé aujourd’hui de 90%. En effet, sur une tonne de plastique rentrant, la technologie permet d’obtenir 900 kilos de plastique recyclé. Dans un futur proche, l’entreprise espère atteindre les 95% pour doubler le nombre de cycles de recyclage. Les 5 ou 10% non recyclés forment un «cake» qui part en valorisation en tant que consommable pour le secteur de la cimenterie par exemple. «Notre procédé intéresse de nombreux acteurs de l’industrie plastique. En parallèle de notre future usine, nous avons pour ambition de déployer notre technologie à l’échelle mondiale par l’intermédiaire de licences. Nous sommes déjà en pourparlers avec une dizaine d’industriels», confie Emmanuel Ladent.
Des exemples déjà concrets
Présent à la pose de la première pierre, parmi de nombreux autres partenaires, L’Oréal a très vite cru en la technologie Carbios.
Jacques Playe, directeur général développement packaging groupe chez L’Oréal aime ainsi à rappeler : «l’innovation est le moteur du groupe L’Oréal dont la philosophie est de «saisir ce qui commence». Nous sommes donc très heureux d’être le partenaire historique de Carbios : une aventure débutée il y a près de sept ans avec la cocréation d’un consortium visant à industrialiser le biorecyclage du plastique, puis en participant en 2019 à l’augmentation de capital réalisée par Carbios au travers de notre fonds de capital-investissement Bold, Business Opportunities for L’Oréal Development». Après la validation du flacon prototype Waterlove Sun Milkfabriqué à partir du plastique Carbios, une présérie de 50 000 pièces est prévue sur le démonstrateur industriel à Clermont-Ferrand avant de lancer une première production dès le démarrage de l’usine en 2026. «Le plastique Carbios nous permet une répétabilité des couleurs du flacon et peut être adopté sur nos lignes de production sans aucune modification de nos process», partage Jacques Playe. Autre avantage : ouvrir le feedstock du recyclé mécanique aujourd’hui limité à d’autres approvisionnements. «85% de notre PET est déjà recyclé sur nos références Biotherm. L’idée est de basculer la totalité du PET Biotherm vers celui de Carbios et dans un second temps de le déployer sur d’autres marques du groupe».