Le grand écart – Par Doria Maïz, rédactrice en chef
publié le vendredi 31 janvier 2020
L’année 2020 débute sur une figure quasi acrobatique pour la filière des emballages plastiques. Le grand écart ! D’un côté, l’Europe demande depuis 2018 à l’industrie d’augmenter le recyclage de leurs produits en fin de vie, pour atteindre le taux de 50% en 2025 et de 55% en 2030.
Engendrant une forte mobilisation de la profession tant sur le plan R&D que financier. L’extension de la consigne de tri est déployée en France pour être généralisée d’ici 2022. Et les transformateurs se sont ainsi engagés à intégrer des quantités croissantes de matières plastiques recyclées avec l’objectif d’un million de tonne d’ici 2025. De l’autre côté, le couperet est tombé en France : la Loi économie circulaire, bientôt adoptée, par le Parlement appelle à l’interdiction programmée des emballages plastiques à usage unique d’ici 2040 pour privilégier le réemploi.
Comment dans ce cas, concilier l’inconciliable ? Augmenter le recyclage des emballages plastiques alors que l’on tend à la suppression même de la ressource à moyen terme.
Une situation que Plastics Europe qualifiait récemment de « paradoxale voire risquée pour la filière, qui pourrait peser sur les décisions d’investissement des producteurs et de la filière recyclage, et d’autant plus dommageable qu’elle vient casser une dynamique positive amorcée ces dernières années pour améliorer le recyclage des emballages plastiques ». Hervé Millet, son directeur des affaires techniques et réglementaires dénonce ainsi la surinterprétation de cette loi au détriment du plastique, de ce fait stigmatisé et aux dérives qu’elle engendre : « nous ne sommes pas opposés à ce projet de loi mais il doit prendre en compte l’ensemble des emballages. Remplacer du plastique à usage unique par un autre matériau à usage unique est une fausse bonne idée et ne va pas dans le sens du réemploi. Sans compter, la question du risque sanitaire posée par des emballages réutilisables ».
Difficile de prédire si ce grand écart pourra perdurer longtemps dans ce contexte. La figure semblant difficile à tenir pour la filière.
Souhaitons donc à l’industrie de l’emballage de trouver les bonnes voies de sortie, loin de tout débat émotionnel. En ce début d’année, quels meilleurs vœux que d’appeler au recul, aux démarches raisonnées, à l’écoute et à l’innovation participative pour démarrer 2020 sous des auspices plus sereins ?!
Extrait de la revue n° 644 – Décembre 2019/Janvier 2020. Reproduction interdite sauf accord écrit d’Emballage Digest ou mention du support