Le groupe Pierre Fabre fédère autour du Green Impact Index
publié le jeudi 30 mars 2023
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Lancé en juin 2021, l’outil Green Impact Index du groupe Pierre Fabre fait des émules. Pas moins de 25 acteurs représentant plus de 1000 entreprises, réunis dans un Consortium, s’allient sous l’égide d’AFNOR Normalisation pour développer un outil d’affichage environnemental et social des produits cosmétiques et de santé familiale. Objectif : prendre en compte la spécificité des produits naturels et pallier les faiblesses méthodologiques des Analyses de Cycle de Vie (ACV) pour offrir un outil simple et accessible à toutes les entreprises, quelle que soit leur traille.
Invité à s’exprimer à la dernière réunion annuelle du Conseil National de l’Emballage à Paris, le groupe Pierre Fabre est revenu sur la genèse du Green Impact Index. Né d’un constat simple – celui d’un manque d’objectivation pour définir un cahier des charges précis d’un produit cosmétique entrainant de l’incompréhension entre les différents services (marketing, R&D, packaging, etc.) – le fabricant français de produits dermo-cosmétiques s’est rapidement retrouvé face aux freins que peuvent présenter les ACV.
A savoir un manque criant de données sur les matières premières que composent les formules : en effet, seuls 12% des ingrédients ont un facteur d’émission carbone et 18% affichent des approximations par extrapolation selon leur appartenance à un groupe de famille et les 70% restant sont sans données. Autres effets délétères : la place prépondérante que prend la phase d’utilisation du produit sur la note finale du produit et la vision productiviste des ACV qui raisonnent en émission de CO2 par kilo produit, une approche trop simpliste pour le groupe Pierre Fabre. «Et c’est sans compter le coût des ACV qui reste très élevé si elles sont faites dans les règles de l’art et les enjeux concurrentiels qu’elles induisent. De là s’est fait ressentir le besoin d’une approche plus concrète, simple et accessible à toutes les entreprises. Tout en étant capable de prendre en compte également les enjeux RSE
du produit (fabrication française, bien-être animal, modèle agricole, etc.)», explique Séverine Roullet-Furnemont, directrice développement durable Green Mission Pierre Fabre.
Green Impact Index, un outil d’éco et de socio-conception
Très tôt impliqué – dès 2011 – dans les travaux sur l’affichage environnemental au niveau français et européen, le groupe Pierre Fabre a pu ainsi s’appuyer sur dix ans de savoirs cumulés pour concevoir son outil, le Green Impact Index. Outil multicritères qui va au-delà de l’impact carbone, il intègre les enjeux sociaux ainsi que de biodiversité et de naturalité, pour aller vers des produits plus durables. La méthodologie s’applique à un grand nombre de familles de produits de soin et de bien-être, allant des cosmétiques aux compléments alimentaires en passant par la santé familiale. Mais la fiabilité et la robustesse du Green Impact Index reposent surtout sur le recours à des normes et des référentiels officiels en matière d’éco et de socio-conception, son approche se voulant plus globale que les ACV des produits. 2700 produitsont été de cette façon commercialisés en France et à l’international avec cet affichage par le groupe Pierre Fabre.
En pratique, le score de chaque produit est obtenu à partir de l’évaluation de 14 critères environnementaux et de six critères sociétaux, avec une pondération de 2/3 pour le premier dans la note globale et de 1/3 pour le second. La note globale est d’abord calculée sur 15, puis ramenée sur 20 pour obtenir le Green Impact Index du produit, ventilé sur 4 lettres A, B, C ou D. Ainsi, un produit est considéré éco-socio-conçu s’il atteint la note de A et B. «L’ambition de Pierre Fabre est d’atteindre 50% du chiffre d’affaires par des produits notés A et B. C’est un engagement fort. Le groupe a d’ailleurs indexé ces notes aux taux de prêt de nos partenaires bancaires», ajoute la directrice développement durable Green Mission Pierre Fabre.
Méthodologie de calcul pour les emballages
Au sein de ce système de notation, la partie packaging est évaluée par une note Ecopack. L’emballage représente ainsi 40% de l’impact environnemental du Green Impact Index. «Nous avons voulu une méthodologie transparente, basée sur BEE l’outil de référence de Citeo, déployée de façon homogène et unique pour tous les produits de notre portefeuille : maquillage, produits rincés, etc.», précise Franck Legendre, directeur packaging, innovation et développement chez Groupe Pierre Fabre.
La note Ecopackprend en compte la vie de l’emballage depuis la livraison du packaging sur le site de la marque à l’usine de conditionnement jusqu’au produit fini expédié aux centres de distribution. N’est considéré ici que le pack primaire et secondaire, excluant les emballages industriels et commerciaux. Dans sa première version du Green Impact Index, sont mesurés trois indicateurs : le poids de l’emballage / volume du produit, la teneur en matériaux recyclés (PCR) et leur recyclabilité (papier, aluminium, verre, PET, PE et PP). «L’outil a depuis évolué, indique Franck Legendre. Aujourd’hui, nous y avons intégré l’outil TREE de Citeo : l’indicateur de la teneur en matériaux recyclables a été remplacé par la recyclabilité effective du produit». Le volet rechargeabilité/réemploi se voit allouer des points bonus sur la base des quantités produites par les usines Pierre Fabre – à savoir deux recharges pour un pot fabriqué. Là aussi, l’outil est en cours d’optimisation, intégrant désormais les données marché et les ventes réelles de recharges afin de réajuster plus finement ce bonus.
Enfin, sont aussi comptabilisés des indicateurs d’économie circulaire et d’impact environnemental de l’emballage : contribution à l’effet de serre, la consommation en eau, l’énergie, l’acidification de l’air, ou encore l’eutrophisation.
«L’esprit du Green Impact Index est aussi de nous faire progresser et de participer à la transformation de l’entreprise par le biais de nos produits. En un an déjà, nous avons pu améliorer la notation de nombreux produits», indique Séverine Roullet-Furnemont.
Quel rôle pour le nouveau Consortium ?
Fort de la première version du Green Impact Index, le groupe Pierre Fabre a souhaité ouvrir cette méthodologie et la rendre collective. Depuis septembre 2022, 25 acteurs se sont réunis sous le statut d’un Consortium. Objectif : unir leurs efforts, sous la coordination d’AFNOR Normalisation, afin de rédiger une AFNOR Spec qui va revisiter la méthodologie du Green Impact Index pour l’améliorer et la rendre utilisable par le plus grand nombre. A l’issue des travaux (prévue d’ici la fin du 2ème trimestre 2023), la méthodologie sera à disposition de toute entreprise – de la TPE au grand groupe international. «La rédaction d’une AFNOR Spec est la garantie d’une démarche ouverte dans le but d’atteindre un consensus entre experts. Elle permettra à ce groupe de travail de franchir le premier palier d’une future norme», explique Chloé Fortin, cheffe de projet normalisation chez AFNOR Normalisation. Le document aura ensuite trois ans pour ses preuves et servir de base à l’élaboration d’une norme internationale. Car l’enjeu est de taille. Face à l’autre Consortium EcoBeautyScore lancé en 2022 par 50 gros poids lourds de la cosmétique dont le groupe L’Oréal – imposant un autre système de notation adossé au PEF (Product Environmental Footprint), méthodologie de l’UE basée sur l’ACV des produits – le Green Impact Index se veut le porte-parole des produits naturels. «C’est une autre vision de l’affichage environnemental que l’on porte et défend. Déconnectée des ACV qui ne prend pas en compte d’autres paramètres comme la biodiversité ou la naturalité des produits. Ce n’est pas par hasard si le Consortium compte parmi ses membres, des groupes comme Léa Nature, Groupe Rocher ou Arkopharma. Et contrairement aux autres méthodes proposées, nous œuvrons pour que le Green Impact Index soit ouvert à tous, gratuit, simple à déployer pour toutes les entreprises et facilement compréhensible par le consommateur», conclut Séverine Roullet-Furnemont. Affaire à suivre.